Encourager des choix alimentaires plus sains : illustration du rôle des politiques publiques ciblant le consommateur

Soutiens financiers à l’achat de fruits et légumes : des effets démontrés sur la sécurité alimentaire et l’état de santé des bénéficiaires

Si les bienfaits des fruits et légumes sur la santé ne sont plus à démontrer, leur consommation reste insuffisante, en particulier chez les populations précaires. De nombreux programmes de soutien financier visant à améliorer la consommation de fruits et légumes sont déployés avec des modalités variables : distribution, prescription, bons d’achat, remises … Afin de dresser un état des lieux de leur efficacité, une étude récente a comparé les programmes existants selon leur méthodologie et leurs résultats. La majorité des travaux inclus dans ce travail montre des améliorations significatives sur plusieurs résultats de santé. Toutefois, les variations méthodologiques nécessitent de mener des travaux supplémentaires afin d’identifier les modalités les plus efficaces.

La consommation quotidienne et suffisante de fruits et légumes permet de réduire le risque de maladies non transmissibles telles que l’obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires (Mokdad et al., 2018). De plus, un apport adéquat – de 250 à 300g – en fruits et en légumes réduit d’environ 10% le risque de mortalité (Schwingshackl et al., 2017). Pour autant, aux Etats-Unis comme dans de nombreux pays, la consommation de fruits et légumes est bien en dessous des recommandations de santé publique.

Seuls 12,3% et 10% des adultes américains respectent les recommandations concernant la consommation de fruits et de légumes (Lee et al., 2019).

Les populations modestes, sont particulièrement éloignées de ces recommandations. De nombreux travaux ont cherché à identifier les obstacles à la consommation de fruits et légumes chez les personnes à revenus modestes. Si l’accessibilité et les normes sociétales sont fréquemment évoquées, la question du coût reste le frein le plus largement cité (Haynes-Maslow et al.,2011). Ainsi, afin d’accompagner les plus précaires, de nombreux programmes d’aide financière aux modalités variées ont été élaborés (Herman et al., 2008 ; Young et al., 2013 ; Alaofè et al., 2017 ; Marcinkevage et al., 2019).

Afin de comparer leur efficacité, une étude récente (Greatorex Brooks & McInerney, 2023) a identifié, comparé et classé les programmes de soutien financier à l’achat de fruits et légumes existants en fonction de leurs différences méthodologiques et résultats.

Le soutien financier à l’achat de fruits et légumes permet d’augmenter leur consommation chez les populations modestes

La majorité des études inclues dans ce travail démontre que les programmes de soutien financier à l’achat de fruits et légumes améliorent significativement leur consommation.

Parmi les programmes étudiés, le programme ”Fruits et Légumes A La Maison« , mené en 2015 en Seine Saint-Denis, a montré l’effet positif de bons d’achats de fruits et légumes sur leur consommation quotidienne chez des enfants issus de milieux défavorisés. L’évaluation de ce programme démontre qu’après un an d’intervention, la proportion d’enfants consommant moins de 3,5 portions de fruits et légumes par jour était significativement plus faible pour les bénéficiaires du programme que pour le groupe témoin (29,4% vs 66,7%) (Buscail et al., 2018).

De la même façon, le projet Veggie Dollar Program, déployé dans le quartier Sankofa de la Nouvelle-Orléans, consistait en la distribution de bons pour l’achat de fruits et légumes. A la fin du programme, 63% des répondants ont indiqué avoir augmenté leurs achats de fruits et légumes et 66% la variété de produits achetés (Ferdinan et al., 2017).

Une amélioration de l’état de santé et de la sécurité alimentaire des bénéficiaires

L’augmentation de la consommation de fruits et légumes permise par ce type de programme est également associée à une réduction du risque de certaines maladies chroniques et de la mortalité associée (Mokdad et al., 2018 ; Schwingshackl et al., 2017)

Plusieurs études ont rapporté une amélioration significative de paramètres anthropométriques et de résultats de santé en lien avec l’augmentation de la consommation de fruits et légumes (Jones et al., 2020 ; Kerr et al., 2020). Cinq études portant sur la prise en charge du diabète montrent que le soutien financier à l’achat de fruits et légumes est associée à une amélioration des taux d’hémoglobine glyquée et de la glycémie à jeun (Bryce et al., 2017 ; Bryce et al., 2021 ; Kerr et al., 2020 ; Richie et al., 2019 ; York et al., 2020). Enfin, d’autres travaux rapportent une diminution significative des visites médicales visites médicales ainsi qu’une baisse des prescriptions d’antibiotiques (Black et al., 2013).

Parmi les articles examinés, dix indiquent que la fourniture d’une aide financière pour l’achat de fruits et légumes est associée à une amélioration de la sécurité alimentaire des bénéficiaires. Une étude menée en 2019 aux Etats-Unis a notamment montré que la prévalence de l’insécurité alimentaire diminuait de 94,1% pour les participants au programme testé (Aiyer et al., 2019).

Approfondir l’analyse des impacts pour déterminer les modalités d’intervention les plus efficaces

En conclusion de cette étude, les auteurs soulignent que ce travail confirme les résultats antérieurs et démontre à nouveau l’efficacité des programmes de soutien financier à l’achat de fruits et légumes évalués vis à vis de plusieurs résultats de santé.

Néanmoins, l’importante hétérogénéité des programmes examinés, ainsi que la diversité des outils de mesure d’impact mis en œuvre rendent la comparaison difficile. Aussi, afin de pouvoir notamment conclure sur les modalités de mise en œuvre les plus efficaces, les auteurs invitent à la réalisation d’études plus approfondies, incluant notamment des groupes contrôle et une randomisation.

D’autre part les auteurs soulignent le besoin d’approfondir le rôle joué par les actions de formation autour de l’alimentation inclues à de nombreux programmes de soutien financier. Ces formations comprennent notamment des ateliers cuisine, des dégustations, des activités pédagogiques et de l’éducation nutritionnelle (Bowling et al., 2016 ; Bryce et al., 2021). Des travaux supplémentaires sont ainsi nécessaires afin d’évaluer la contribution de l’éducation dans l’efficacité des programmes de prescription.

Basé sur : Greatorex Brooks E, McInerney M. Community-based fruit and vegetable prescription programs: a scoping review. Journal of Nutritional Science. 2023;12:e99.

Méthodologie
Messages clés
  • Les programmes de prescription de fruits et légumes examinés dans cette étude sont efficaces pour améliorer la qualité de l’alimentation, l’état de santé des bénéficiaires ainsi que leur sécurité alimentaire.
  • L’inclusion d’éducation nutritionnelle en plus des prescriptions de fruits et légumes permettrait de renforcer l’efficacité des programmes.
  • La réalisation d’études supplémentaires est nécessaire pour permettre une comparaison de l’efficacité de ces différents programmes de prescription de fruits et légumes.
Références
Retour Voir l'article suivant