Les barrières à la consommation de fruits et de légumes

Obstacles perçus pour adopter une alimentation saine : hommes et femmes ne sont pas identiques !

C’est une évidence : l’amélioration de l’alimentation est un enjeu de santé publique. Une alimentation déséquilibrée est associée à un risque supérieur de maladies non transmissibles (maladies cardiovasculaires, cancer ou encore diabète de type 2) qui ont des conséquences importantes sur la santé et l’économie 1. James et coll. ont constaté qu’une alimentation plus saine peut représenter un bénéfice énorme en termes de santé 2. Etudier les obstacles que chacun perçoit lorsqu’il s’agit d’adopter une alimentation saine, peut permettre de mieux comprendre le mode d’alimentation des personnes, notamment leur consommation de fruits et légumes (F&L). Cette étude examine les liens entre la consommation de F&L rapportée par les sujets et les obstacles perçus pour adopter une alimentation saine.

L’enquête Scottish Health Survey 2008-2011

Cette étude s’est appuyée sur la Scottish Health Survey, une enquête nationale représentative des foyers écossais 3. Les données des années 2008, 2009, 2010 et 2011 ont été compilées. Les questions du module «Connaissances, attitudes et motivations» étaient posées à des adultes âgées de plus de 16 ans et portaient sur les obstacles perçus dans l’adoption d’une alimentation saine (n = 8319). Les répondants devaient sélectionner tous les obstacles possibles qu’ils percevaient dans cette démarche :

  • manque de volonté,
  • prix des aliments sains,
  • facteur plaisir (« Les aliments sains sont ennuyeux, leur goût ne me plaît pas. »),
  • manque de disponibilité des aliments sains,
  • temps nécessaire pour les préparer,
  • fait de ne pas savoir cuisiner,
  • manque d’informations sur «l’alimentation saine»,
  • autres obstacles,
  • manque de soutien de l’entourage (famille, amis, collègues).

Les répondants rapportaient également la quantité de F&L consommée la veille, en indiquant s’ils avaient respecté les recommandations nationales, le «5 fruits et légumes par jour» à savoir 400 g de F&L.

Des modèles de régression statistiques ad hoc ont été utilisés pour vérifier l’association entre la consommation des 5 F&L recommandés et les obstacles perçus dans l’adoption d’une alimentation saine. Les hommes et les femmes faisaient l’objet de modèles distincts, en intégrant des facteurs démographiques (âge, lieu, situation de famille, nombre d’enfants au sein du foyer), socio-économiques (revenus, niveau de scolarité, activité économique) et le mode de vie (consommation d’alcool, exercice, tabagisme).

Manque de volonté : l’obstacle le plus fréquemment perçu

21 % des hommes indiquaient consommer 5 F&L par jour, contre 25 % des femmes. La figure 1 montre que le manque de volonté est l’obstacle le plus fréquemment rapporté, suivi par le prix des aliments sains chez les femmes et le facteur plaisir chez les hommes.

Les femmes ne sachant pas cuisiner sont moins susceptibles de consommer les fruits et légumes recommandés

Lorsque les femmes déclaraient le manque de volonté comme obstacle à l’adoption d’une alimentation saine, la probabilité de consommer la quantité de F&L recommandée diminuait de 3 %.

Le fait de ne pas savoir cuisiner (10,3 %) et de ne pas avoir le temps de préparer les aliments sains (5,6 %) réduisait également significativement la probabilité de consommer 5 F&L par jour.

Le facteur plaisir était le seul obstacle significatif signalé à la fois par les hommes (6,8 %) et les femmes (10,2 %). Il est intéressant de noter que le prix trop élevé des aliments sains ne présentait pas de lien significatif avec la consommation de 5 F&L par jour, bien que cette réponse ait été citée par 16,9% des femmes et 15,7 % des hommes.

Les obstacles couramment perçus n’ont pas tous un effet sur la consommation de fruits et légumes

Cette étude apporte un éclairage intéressant sur le lien entre les obstacles perçus pour adopter une alimentation saine et la probabilité que les individus consomment la quantité de F&L recommandée. Alors que les études précédentes avaient identifié les obstacles fréquemment perçus, cette nouvelle étude estime leurs effets sur la consommation individuelle de F&L. Cette analyse montre que les obstacles couramment perçus n’ont pas tous un effet sur la consommation de F&L.

Ainsi, bien qu’étant l’obstacle le plus fréquemment rapporté, le manque de volonté a un effet significatif sur la consommation de F&L uniquement chez les femmes. Le prix des aliments est fréquemment rapporté en tant qu’obstacle perçu, mais n’a pas un impact significatif dans le cadre de cette analyse. Une explication possible est que, si le fait de percevoir le prix comme étant trop élevé n’est pas un facteur impactant la consommation de F&L, cet obstacle peut être important dans d’autres aspects de l’alimentation saine.

Si l’on s’intéressait au manque de volonté chez les femmes ?

Les décideurs politiques pourraient adopter des interventions touchant une proportion plus élevée de la population, par exemple en s’intéressant au manque de volonté chez les femmes, ce qui pourrait avoir un petit effet sur la consommation de F&L. Ils pourraient aussi choisir une approche plus ciblée, par exemple le temps nécessaire pour préparer les aliments chez les femmes, facteur qui pourrait avoir un effet plus important sur la consommation de F&L.

Liam Mc Morrow
Unité de Recherche en Economie de la santé, Institut des Sciences de la Santé appliquées, Université d’Aberdeen, ROYAUME-UNI
collaborateurs
Ces travaux ont été validés pour publication dans le Journal of Public Health, doi : 10.1093/pubmed/fdw038
  1. World Health Organization. Global action plan for the prevention and control of noncommunicable diseases 2013-2020. Geneva: World Health Organization; 2013.
  2. James WP, Nelson M, Ralph A, Leather S. Socioeconomic determinants of health. The contribution of nutrition to inequalities in health. BMJ. 1997 May
    24;314(7093):1545-9.
  3. Scottish Executive. The Scottish Health Survey 2011: Volume 3: Technical Report. 2012.
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